Le plus beau banc du monde

Au regard de mon demi-siècle déjà bien dépassé, mon premier contact avec Marseille est récent.

En réalité, voilà déjà onze ans que la cité phocéenne a jailli pour la première fois au bout de l’autoroute A7 et que je suis tombée amoureuse de sa lumière, de la belle bleue, de ses calanques et de ses habitants.

Depuis quelques jours, me voilà enfin marseillaise pour de bon. Le tome 2 d’une merveilleuse aventure.

Marseille se visite et se mérite à pied. Avec ses cent onze quartiers s’étalant sur plus de 240 km² , cela va prendre du temps. Du côté du Vallon des Auffes et du Roucas Blanc, j’aime me perdre dans les dédales de ruelles et de traverses ornées de bougainvillées. C’est magique ainsi qu’un sacré exercice cardio. Je n’ose imaginer la tête de transporteurs devant livrer par là.

Inévitablement presque chaque découverte se termine ou se déroule en partie sur la Corniche. Sur cette plus belle rade du monde où se situe le plus grand banc du monde.

Et sur le tronçon à proximité du mémorial des rapatriés, une immense hélice de bateau réalisée par le sculpteur César, le banc en béton brut s’est paré de milliers de tesselles de toutes les couleurs.

Je ne me lasse pas d’admirer les dizaines de mosaïques défilant sur plus de 220 mètres, toutes plus belles les unes que les autres. L’idée a germé il y a plusieurs années chez l’artiste Paola Cervoni de l’association Viv’Arthe, inspirée par ses 8 années vécues à Barcelone. Pourquoi laisser ce banc en béton et ne pas donner aux marseillais la possibilité de composer leur propres œuvres colorées en mosaïque et d’y partager une partie de leur âme.

Ce ne fut pas une mince histoire que de convaincre les politiques. Finalement, grâce à la force de persuasion de Paola et au génie de cette initiative, ce sont plus de 12000 marseillaises et marseillais - grands et petits et de toutes religions et nationalités, des écoles, des maisons de retraite, des associations de quartier, des entreprises ou encore des particuliers - qui ont depuis participé à orner leur morceau de banc.

Des bancs publics pour se réunir sans se retrouver sur le banc de touche, pique-niquer, pêcher le poisson, s’y bécoter, s'asseoir avec son amoureux, s’y oublier en absorbant le spectacle des passants et gabians ou tout simplement saluer le soleil ou la mer sans l’amertume.

Notre morceau de banc est à l’image de notre vie, le vallon, la mer, un aigle qui prend son envol, un lion caché.

Suivez vos rêves, ils connaissent le chemin...